Distance
Directeur photo : Yamasaki Yutaka
Critique
Réalisateur proche du genre documentaire, Hirokazu Koreeda est un cinéaste japonais à suivre et subtil dans ses approches cinématographiques, dont ses scénarios sont l’un des éléments les plus importants de ses réalisations, notamment avec After Life que j’avais vu il y a quelques années qui m’avaient réellement bouleversé et surtout intéressé de plus prêt à la filmographie de ce réalisateur atypique. Distance n’est pas si loin de son film After Life à vrai dire, puisqu’il traite lui aussi de la relation de l’homme face à la mort et de la recherche de la paix face à celle-ci, ici sous la forme de défunts ayant appartenu à une secte du Japon et de leurs proches qui commémorent leurs tragiques morts. Le sujet de la mort est très sensible au Japon et il n’est pas aisé pour un réalisateur d’en parler facilement sans se heurter à une sévère critique du public, pourtant la mort est devenue depuis les années 2000, un élément assez présent dans les films japonais en passant de Kaïro à Ring ou encore Ikinai sous les traits du suicide.
Distance arbore une construction particulièrement divisée, entre flashbacks et scènes dans un présent actuel, la complexité du scénario ne sera pas à la portée de tous puisqu’il échappe à tous les carcans conventionnels de la rédaction scénaristique comme si Koreeda filmé de manière aléatoire à l’improviste, spectateur de l’action, libre de ses cadrages, proches des protagonistes, proche du documentaire.Sur le fond du scénario, Koreeda ne cherche pas à expliquer la raison qui a poussé ces Japonais bien sous toutes formes à intégrer une secte et à se suicider de manière collective, mais à filmer les comportements et les sentiments des proches des défunts, il ne fait en aucun cas, une étude sociologique sur les comportements sectaires, mais se focalise sur le quotidien de ces protagonistes avec des acteurs qui relèvent un défi d’interprétation.
Asano Tadanobu excelle à nouveau dans la sobriété de son interprétation et Susumu Terajima surprend dans son rôle d’un violent introverti loin de ses habituels rôles de gangster que l’on a souvent vu dans les films de Takeshi Kitano. Ce qui devient le plus difficile à appréhender avec Distance, c’est sa mise en scène, dans un premier temps, Koreeda fait appel à l’usage de la technique de la caméra à l’épaule pour suivre la marche des ses personnages, un aspect documentaire que l’on retrouve bien chez le réalisateur, mais dans la seconde partie de Distance, la caméra devient quasi immobile, une caméra qui contemple un état de stase en usant des bonnes distances pour apercevoir les sentiments de ses protagonistes.
Résultat, le spectateur peut se sentir déboussolé par ce rythme, un peu comme les protagonistes, enfermés à huit clos, où leurs esprits également déboussolés cherchent à trouver une réponse à leurs questions communes. Au final, Distance nous laisse un sérieux nuage au dessus de la tête où les questions restent en suspens sur des images finales choquantes, dommage que Distance n’a pas réussi à percer lors du festival de Cannes de l’époque, son originalité aurait pu faire la différence.