Le Goût du Sake

Le Goût du Sake
Aka : An Autumn Afternoon | Japon | Drame | 1962 | 110 mins | Un film de Ozu Yasujiro | Avec Ryu Chishu, Mikami Shinichiro, Iwashita Shima, Kato Daisuke, Tono Eijiro, Okada Mariko et Sada Keiji

Scénaristes : Ozu Yasujiro & Noda Kogo

Scénario : Hirayama Shuhei est veuf et vit avec sa fille Michiko qui tient la maison, ainsi que son fils cadet Kazuo, tandis que son fils aîné Koichi est déjà marié. Il aime fréquenter les bars à saké avec des collègues de travail, qui lui conseillent de marier sa fille…

Critique

Après Dernier Caprice en 1961, Ozu réalise son dernier film de sa période couleur, mais également son dernier film de sa filmographie complète, un film complet, regroupant tout le talent du cinéaste dans un peu moins de deux heures, dans une ambiance si plaisante pour le connaisseur du réalisateur, mais qui peu paraitre froide pour les amateurs non habitués, dans ces décors d’usines métalliques des années 60, bien loin des technostructures et mégalopoles d’aujourd’hui.Ici, avec Le Goût du Sake, Ozu nous offre une quasi-perfection formelle sous les traits d’une histoire intimiste accrocheuse, passionnante et prenante, car dans ce film, aucun plan n’est superflu, la lisibilité de celui-ci est parfaite, et quand on arrive à s’intégrer dans son univers, le cinéma d’Ozu est chaleureux, attachant et généreux, à travers une galerie de portraits familiaux comme toujours chez le cinéaste devenu maitre dans la fresque inter-générationnelle.

À choisir entre Dernier Caprice et Le Goût du Sake, le choix semble difficile, pourtant j’ai un faible pour le Goût du Sake et ses scènes de boissons fortes en émotions, ses scènes répétitives des gestes de tous les jours, se lever, aller travailler, discuter entre amis autour d’un verre, évoqué sa journée et réfléchir à demain, chercher à devenir meilleur chaque jour et surtout à se marier tant qu’il est encore temps, sont chez Ozu des scènes habituelles et sublimées.Mais le jour où un homme se voit reprocher par ses collègues de travail, la condition qu’il impose à sa fille de rester avec lui et de ne pas profiter de la vie comme elle devrait le faire, cela en devient un film, un film fort en émotion, car si ici, c’est Ryu Chishu qui doit se faire cette idée de se séparer de sa fille, c’est également Ozu qui doit faire son deuil, car durant le tournage du film, la propre mère du réalisateur décède et forcément l’œuvre en devient plus personnelle.

C’est ce Ryu Chishu ici, qui prend conscience du malheur qu’il engendre au final à sa fille et c’est lors de son retour chez lui, qu’il fait face à la solitude qu’il a toujours redouté, pourtant, la vie continue chez Ozu, même si cela implique d’accepter le changement, qu’il soit facile ou difficile à accepter.Concernant le cadre du film, Le Goût du Sake se place dans la période de transition d’un Japon en mutation soutenue par une constante bande-son de la nostalgie du temps passé qui donne bien évidemment ce sentiment de mélancolie du temps qui passe et de la vieillesse qui s’installe peu à peu chaque jour, comme le petit verre de saké que prennent régulièrement nos protagonistes jusqu’à nous mettre face à notre propre vieillesse, à notre propre solitude qu’il faut surmonter.Bien évidemment, avec Ozu, il s’agit toujours d’un film cadré au millimètre prêt au rythme apaisant soutenu par des jeux d’acteurs de grande qualité.

Au final, Le Goût du Sake est un classique et surtout est important dans la filmographie du réalisateur puisqu’il s’agit de son dernier ouvrage, d’une grande qualité qui comme toujours capte à chaque instant l’attention du spectateur, le transporte et l’implique de manière émotionnelle dans ce qui se déroule, Ozu est un grand cinéaste, aucun doute à avoir, Le Goût du Sake le montre une fois de plus et surtout pour la dernière fois.

Résumé
Date de la critique
Titre du film
Le Goût du Sake de Ozu Yasujiro
Note
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