Shara

Shara Cover

Titre original : Sharasojyu
Réalisé par : Kawase Naomi
Année : 2003
Pays : Japon
Genre : Drame
Durée : 101 mins

Interprété par

Fukungaga Kohei
Hiyoudo Yuka
Kawase Naomi
Higuchi Kanako

Scénario : Historique de Nara, ancienne capitale du Japon. La famille Aso perpétue depuis des générations la tradition de la fabrication artisanale de l’encre de Chine. Le jour de la fête du Dieu Jizo, dans la chaleur torride de l’été, alors que les deux enfants se poursuivent, Kei disparaît soudainement au coin d’une ruelle… Ce jour-là, la vie s’arrête pour la famille Aso. Cinq ans ont passé. Shun a maintenant dix-sept ans. Au lycée, il s’est inscrit à l’atelier de peinture. Il travaille sur le portrait de son frère disparu qu’il n’a jamais pu oublier. Shun et son amie d’enfance Yu sont attirés l’un par l’autre, mais une douleur secrète les empêche de vivre cet amour…

Critique

Entre La Danse des Souvenirs en 2002 et Naissance et maternité en 2006, la réalisatrice Kawase Naomi, trop peu connue en occident, même après un petit coup de boost grâce à son récent succès au dernier Festival de Cannes pour son film, La Fôret de Mogari, se donnait déjà sur le film Shara, un drame semi-documentaire, une révolution dans la nouvelle vague du cinéma japonais, dont Kawase Naomi à toute foi et cherche tant bien que mal à casser toutes les conventions habituelles du cinéma japonais, en s’amusant à tisser un film à la limite du documentaire, comme s’est si bien le faire Hirokazu Koreeda, avec une liberté inimaginable dans la mise en scène de son œuvre.

Dans Shara, Kawase Naomi, scrute le moindre détail, comme si elle était elle-même, spectatrice du monde qu’elle film, s’imprégnant des scènes qui se déroulent, à la fois personnage intime du film qui se trouve toujours à distance de l’action et propre protagoniste caché du film, témoin de l’action.

Shara image 1

Shara, c’est une famille, incapable de faire le deuil d’un enfant disparu il y a cinq ans, comme enlevé par les dieux, une douleur qui survient dès le début du film, comme pour soutenir cet état de fait durant la grande majorité de la durée du film, afin de filmer la douleur de cette famille, d’un fils qui n’arrive pas à se séparer de son frère, fusionnel au point de vouloir vivre à travers lui, à l’image du tableau qu’il peint pour lui.
Kawase Naomi, réussit ici à capter le moindre détail, à voler chaque minute de la vie de cette famille, grâce à des plans-séquences troubles et une photographie à la limite de l’aveuglement.

Shara image 2

La cinéaste s’attelle à filmer l’émotion de ces protagonistes, la douleur qu’ils peuvent ressentir, jusqu’à filmer une scène d’une puissance incroyable, image-choc de la nature du film, cette grande fête populaire de Basara.

Toute la clé du film tient sur cette incroyable séquence, une fête explosant de vie, vue au travers de caméras énergiques, des plans magnifiques sur la détermination de Yu, cette danseuse qui donne de son être pour cette fête, véritable danse de commémoration, euphorie grandissant dans le public, moment d’un éclat d’une force libératrice, une véracité rarement égalée se présente à nos yeux.

Il n’y a aucun doute, cette scène est tout simplement l’une des plus belles et des plus fortes scènes du cinéma japonais et je dirais même du cinéma international.

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Le plus incroyable, c’est que la cinéaste n’emprunte jamais les chemins conventionnels du cinéma, elle ne se soumet à aucune règle, si ce n’est de tenter de capter la vérité des faits, en brisant ses raccords, juxtaposant les points de vue sans un formalisme perceptible, via un cadrage sommaire, technique de la caméra à l’épaule, filmant au plus près l’action.

Kawase Naomi cherche à offrir un cinéma attentif, un cinéma qui cherche à capter les plus purs moments de grâce de la vie et celle-ci y arrive tout à fait, donnant à Shara, une aura très particulière.
Elle filme l’amour qu’elle a pour le quotidien de cette petite ville nipponne, son désir de capter le moment magique détaillé, grâce à une volonté de ne pas omettre la nature qui l’entoure.

Shara est tout à fait maitrisé sur l’aspect rythmique, la photographie permet de s’imprégner émotionnellement dans l’œuvre et le déroulement de l’action se fait sans répétition, malgré le thème central du quotidien de la vie de cette famille.

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Shara mélange fiction et documentaire d’une manière tout à fait réussite, offrant aux spectateurs un rare moment de cinéma, une évasion cinématographique au cœur du quotidien d’une famille nippone, une découverte émotionnelle incroyable qui doit tout simplement être vu de tous.
Kawase Naomi reste une cinéaste de talent et promet d’offrir des films aussi anti-commerciaux qu’excellent.

Résumé
Date de la critique
Titre du film
Shara de Naomi Kawase
Note
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