Hogs and Warships
Titre anglais : Pigs and Battleships
Titre original : Buta to gunkan
Autre titre : The Flesh is Hot
Titre français : Cochons et cuirassés
Réalisé par : Shohei Imamura
Année : 1961
Pays : Japon
Durée : 105 mins
Interprété par
Hiroyuki Nagato
Jitsuko Yoshimura
Yoko Minamida
Shiro Osaka
Sanae Nakahara
Shoichi Ozawa
Masao Mishima
Eijiro Tono
Akira Yamanouchi
Tetsuro Tamba
Takeshi Kato
Akira Nishimura
Kin Sugai
Taijiro Tonoyama
Scénario : Dans le Japon de l’aprés-guerre occupé par les troupes américaines,la destinée de Kenta, un jeune homme tiraillé entre son appartenance à un gang de Yakuzas organisant un trafic de cochons, et la vie avec sa courageuse fiancée Haruko qui rêve d’une vie plus honnête.
Critique
Entre Les Enfants du charbonnage en 1959 et La Femme Insecte en 1963, Shohei Imamura, maitre cinéaste japonais réalise une œuvre, Hogs and Warships, de son titre français, qui fait partie d’un groupe qui forme les premiers films du réalisateur, toujours aussi proche de son époque et de la reconstruction du Japon, tout comme Endless Desire, qui faisait paysage d’un Japon d’après-guerre où l’omniprésence américaine se fait sentir dans la vie courante des gens du peuple, tentant de survivre par tous les moyens, entre le commerce au marché noir, les magouilles et les faux espoirs d’un meilleur lendemain, Imamura va se concentrer pendant un peu plus d’une heure et demie à décrire la vie d’un jeune voyou répondant au nom de Kenta, pas mauvais dans l’âme, cherchant à se faire un bon paquet d’argent grâce aux trafics de cochons pour mener une vie meilleure avec sa fiancée Haruko, une fille bien plus pragmatique que lui et rêveuse du monde américain qui l’entoure.
Une chose est sure, Hogs and Warships ressemble fortement sur plusieurs points à son premier film Désir Inassouvi, montrant une fois de plus, la tension qui peut animer un groupe d’individu, la même description de l’avidité et de la cupidité, cependant, Imamura maitrise d’une bien meilleure manière son sujet, mettant toujours en avant sa vision sociale de son pays en gardant toujours à l’esprit ce recul et cette touche d’humour sous un message contestataire, il nous montre les comportements humains sous tous les angles, notamment leurs mauvais cotés, les associant à des cochons, une comparaison de l’homme à l’animal, déjà présente dans son premier film Désir Inassouvi, sous une intrigue soignée offrant ainsi aux spectateurs un pur moment de cinéma où Imamura peut faire étalage de sa technique et de son talent de metteur en scène.
Cependant, son style ne sera pas aussi maitrisé que l’œuvre qui le suivra, La Femme Insecte, un summum de son talent en tant que réalisateur.
C’est donc comme pour son précédent film, Mon deuxième frère, qu’il décrit les bas-fonds d’après-guerre sous un magnifique scope en noir et blanc, en suivant un groupe de yakuza de l’époque, pactisant avec l’occupation américaine, loin des nobles causes et du respect des valeurs de la nation, qu’il reprend donc son idée maitresse, celle de la métaphore de l’homme à l’animal, ici les yakuza assimilés à des cochons, véritables traites de leur pays, mais Imamura ne montre pas seulement ces yakuza du doigt, mais le Japon entier, qui se perd dans la culture américaine au détriment de la leur, laissant disparaitre peu à peu l’âme japonaise de leur pays.
Du coté de l’interprétation, on retrouve Jitsuko Yoshimura, qu’on à déjà pu voir dans la magnifique œuvre, Onibaba, qui ne manque pas ici de sensualité, cependant moindre que dans le film de Kaneto Shindo, ou encore Tetsuro Tamba qui joue le chef gangster, se croyant atteint d’un cancer alors qu’il n’a qu’un petit ulcère, en gardant toujours en tête un humour omniprésent, mais souvent grotesque, notamment dans l’incroyable scène finale, lorsque la totalité des porcs capturés sont relâchés en pleine ville, écrasant leurs anciens bourreaux.
Shohei Imamura ne manque pas de capacité technique, dès le plan d’ouverture, le réalisateur introduit un plan aérien saisissant, partant du drapeau américain, survolant la ville pour terminer sur les quartiers des prostituées de la ville, symbole de la conséquence de la présence américaine et de la dénonciation d’une économie souterraine ayant malgré tout participer à la réussite économique du Japon.
La mise en scène utilisée est flamboyante et rythmée, les travellings sont également somptueux, mettant en valeur l’animation de villes et la vie des personnages, même si parfois, celle-ci ressemble à une mise de série B, elle ne manque pas de rendre l’action attrayante.
Au final, Hogs and Warships est une œuvre forte, montrant déjà le talent d’un réalisateur exceptionnel, un film ambitieux et totalement contre cette présence pesante des Américains au Japon de l’époque, un mélange de grotesque et de réalisme dans lequel seule la femme sort gagnante et symbolise les jours meilleurs, l’homme reste pour Imamura un simple animal alors que la femme devient source d’espoir.
Un excellent film pour tous amateurs de cinéma japonais, une belle prouesse du réalisateur qui ne manquera pas d’étoffer son sujet de longues années après.